
Photographie de Pierre et ses élèves entre février 1888 et mars 1905 devant la mairie/école de Rosiers d'Egletons. @Elise Chagot
Parfois, dans les arbres généalogiques des êtres sortent du lot, parce qu’ils ont un parcours particulier, un prénom qui nous interpelle, ou ils s’inscrivent dans une lignée ou on a sans le savoir des photos d’eux … Le couple évoqué dans ces lignes cumulent toutes ces raisons à eux deux !
Thée-Zoé & Pierre
Thée-Zoé Delphine est la fille de Pierre-Joseph et de Madeleine. Avec un tel prénom qui signifie littéralement déesse de la vie, on devine que son père est instruit, qu’il a fait du grec et effectivement l’homme, après avoir suivi les cours de messieurs Delafond, Lacoste et Vedrenne à l’école primaire d’Egletons, intègre l’Ecole normale de Tulle (créée 6 ans auparavant, en 1833 par la loi Guizot)dont il sort muni du brevet élémentaire d’enseignement, le 7 septembre 1839.
Pierre-Joseph enseigne à S. puis à D. où il rencontre son épouse. De leur union, naissent quatre enfants dont Thée-Zoé, en 1847. L’homme sans nul doute est exigent avec ses enfants et Thée-Zoé se montre une bonne élève qui après avoir suivi la classe de son père est confiée aux sœurs de Saint-Vincent-de-Paul à Egletons. On peut penser qu'à son tour elle intègre l'Ecole normale dont l'ouverture pour les femmes date de 1838. En avril 1867, alors qu’elle n’a pas encore 20 ans, elle obtient à son tour le brevet élémentaire d’enseignement. Elle commence par enseigner les travaux d'aiguilles, aux côtés de son père. Cette même année, elle épouse Pierre.
Pierre est né en 1844 sur le plateau de Millevaches où son père est jardinier. Il se révèle être un élève intelligent et actif, d’un naturel très gai, ses professeurs, sûrs de ses qualités, le pousse à poursuivre ses études. Il intègre lui aussi l'Ecole normale de Tulle, ses professeurs confirment ses capacités, ne lui reprochant seulement que de se laisser parfois entraîner par ses camarades, mais il obtient le brevet élémentaire d’enseignement, le 1er septembre 1864, en se classant troisième de sa promotion.
A la faveur des nouvelles lois en faveur de l'enseignement, la position sociale des instituteurs s'améliorent. En 1867, les communes de plus de 500 habitants doivent se doter d'une école de filles, et des collèges de jeunes filles sont créés. Thée-Zoé n'est plus cantonnée qu'à l'enseignement des travaux d'aiguilles, elle dirige sa propre classe en parallèle de son époux. Le couple est alors simultanément nommé dans les mêmes communes.
Très apprécié des parents d’élèves dont il a l’estime générale, Pierre refuse notamment un poste de commis d’inspection académique à Aurillac sur les instances de son beau-père et des habitants qui tiennent à le conserver à la tête de leur école. C’est un maître « aux manières douces, intelligent, d’une tenue parfaite, doublé d’un horticulteur de connaissances pratiques ».
Thée-Zoé, à l’instar de son époux, se révèle être une maitresse intelligente et capable, pleine de zèle et de dévouement pour ses fonctions. Elle n’a de cesse de travailler à son instruction personnelle, et cherche constamment à améliorer ce qui peut être défectueux dans les classes dont elle a la charge.
"Celui qui ouvre une porte d'école, ferme une prison."
Thée-Zoé et Pierre mettent un point d’honneur à la réussite de leurs élèves comme de leurs enfants. L'analphabétisme est en net recul, le certificat d'études primaires, le "certif" est créé en 1874. En 1880/1881, la loi Ferry laïcise les manuels, instaure l'obligation et la gratuité de l'enseignement public, le catéchisme (au seine de la classe) est supprimé, remplacé par l'instruction morale et civique. En 1889, les maîtres d'école deviennent des fonctionnaires de l'Etat. En 1890, 95% des femmes peuvent signer au bas de leur acte de mariage ! Pierre et Thée-Zoé font partie des acteurs de ces changements.
En septembre 1892, Pierre enterre à quelques jours d’intervalles son épouse puis leur fille, âgées respectivement de 45 et 16 ans. Pierre se rapproche alors de son fils Emile, devenu pharmacien.
En explorant nos histoires familiales, nous découvrons que la multitude des histoires individuelles de nos ancêtres sont l'Histoire que l'on nous enseigne. On prend toute la mesure des liens qui nous unissent aux générations précédentes.
Il y a ainsi un grand nombre d'archives, parfois insoupçonnées, nous permettant de retracer précisément des parcours de vie, ou des tranches de vie. A partir d'elles, on peut établir de véritables biographies. Parfois, il est même possible de retrouver une photo dans ses dossiers, joie extrême de mettre un visage sur un nom !
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